Encierro à Jerez

ENCIERRO DUCATI A JEREZ.
HOMBRE ! DAME UNA CAÑA QUE ME MUERO CON LA GARGANTA SECA DE LA OSTIA !
Le soleil monte inexorablement dans le ciel au-dessus de la terre ocre rouge d’Andalousie parsemée d’oliviers, de chênes lièges qui filtrent une lumière blanche et crue, apaisant quelque peu la fournaise promise et redoutée. Bientôt, Hélios imposera sa loi impitoyable.
Dehors, des centaines de bécanes rutilantes arrivent tous azimuts, dans la fureur mécanique du métal hurlant surchauffé. Leurs cavaliers gainés de cuirs et en bottes de piste, y’a du Alpinestars et du Dainese comme s’il en pleuvait, les selles lestées de bagageries improvisées, filets araignée retenant les packs de San Miguel. Les chromes miroitent sous le soleil, le parking est comme une voile argentée qui faseye au-dessus de la mer.
On s’interpelle, ça piaffe, ça klaxonne. Allons vite prendre un café avant que ce soit le maul pénétrant. On rentre dans la bodega, chez « DON PACHECO » en écartant le rideau de scoubidous en plastique gras comme du papier tue-mouches. A l’intérieur, ça gueule, le son de la téloche à fond avec un jeu télévisé, un animateur dents touches de piano, cheveux gominés comme Julio Iglesias fait glousser des bimbos empaquetées comme des chocolats Ferrero. La radio derrière le bar diffuse du Flamenco, volume à ouèque. Une rangée de tabourets de bar en bois et paille barrent le long zinc alu où trône un enchevêtrement de tapas en équilibre. Le sol en céramique est jonché de papiers, de cure-dents, de noyaux d’olives laissés par la dernière marée haute étouffant un chouia le couinement des pieds des tabourets sur les carreaux. La machine à sous, coincée entre un distributeur de bombecs fluos et de super balles rebondissantes, et couronnée de verres à moitié vides d’ Estrella tiédie crachouille des HOLAAAAA… ZIIIIIIK…KREEEEK .. !!! à intervalles réguliers. Sa façade promet une vie rêvée sous les tropiques, chemise à fleurs, en décapotable rouge, le coffre dégueulant de pièces d’or, et balance des flashs de lampe strobo qui fascinent los muchachos interdits, Chupa-Chups en bouche, rivière de salive écarlate au glucose dégoulinant des lèvres jusqu’au t-shirt.
Le cuistot, camiseta trempée de sueur, tablier criblé d’éclats de sobresada généreusement tartinée à la spatule sur la plancha, lutte comme il peut pour abreuver tout ce monde qui piaffe et trépigne. Au milieu de la salle, des danseurs de flamenco virevoltent, se toisent du regard frappant le sol du talon dans des rafales de claquements de Tracas Valencianas. Le menton presque menaçant, torse bombé, poitrines comprimées, regard de brasero incandescent et peaux brunes tannées par le soleil Andalou.
Ce vin blanc frais avec cette légère amertume d’amande verte qu’on sert dans les corridas coule à flots, Les carajillos au Brandy CARLOS III effacent les dernières somnolences de la nuit courte passée sur la route, à traverser les grandes plaines de Castille, les hauts plateaux de la Meseta central avec l’horizon infini et le soleil qui semble ne plus se coucher.
Sur la « barra », des filets d’anchois dans 6 litres d’huile se noient, le boudin noir frit en suintant comme un carter de Bultaco. Pimientos del padrón, piquillos, boquerones, chorizo, joues de porc braisées, Jamon Bellota qui fond dans la gueule avec ce goût de noisette, bocadillos et montaditos de thon mayo, gambas grillées, poivrons, olives, calamars à la Romaine, chipirones à la plancha…. Un univers gastronomique en miniature sur 10 mètres de long. On joue des coudes et on ruse pour commander, en se contorsionnant entre la poussette du petit dernier, Joselito, et Encarnacion, la grande Andalouse, épouse du Torero Manolete. Au mur, des dizaines d’affiches de corrida avec le surnom des héros : Bombita, El Chucho, Machete. On trouve aussi des gloires de la vitesse Espagnole avec Crivillé, Angel Nieto, Pedrosa, la F1 avec Fernando Alonso et les footeux avec Raul, Morientes et Iniesta.
Sur le parking, Teresa fout des tapes ( calbots ) sur le crâne de Carmelo… comme Benny Hill faisait sur le petit vieux rachitique les dimanche soir de nos jeunes années. Regard d’âne battu efflanqué et piteux. Il lui avait promis une suite romantique à l’hôtel 4 étoiles de Jerez de la Frontera « EL HIDALGO DE LA CASTILLA » avec Hammam, Jacuzzi, boutique chicos et mini- bar bourré de mignonettes de Chivas et Cava Freixenet.
Il se retrouve dans un Algéco posé sur le parking de l’hôtel, coincé entre une bétonnière et des sacs de ciment, le réchaud Camping gaz dans la Seat Break avec les conserves de Berberechos à l’huile et les Mejillones au vinaigre, le nescafé en poudre à péter au burin, les couverts en plastoc. Au milieu d’une pile de magazines HOLA ! la gazette des riches qui font rêver les pauvres, et parmi les tôles de bières vides San Miguel, il cherche sa brosse à dent. C’est Carlo Pernat qui lui a piqué la suite ! Arrivé la veille avec Giovanna, il a promis au taulier une virée sur le front de mer de Rimini en Gitane Testi bleu pailleté, pot détente de 2 mètres de long, cartouche silencieux serre-kiki qui dépasse de la roue arrière, bouchon chromé Monza, poignées Tomaselli… Byzance les gars ! Parasols, Pédalos et chaises-longues, glace Stracciatella qui fond en perlant sur la poitrine offerte et bombée de Graziella en Bikini, Ristretto devant le Kiosque à journaux de Luigi avec la Testi encore fumante comme le Beretta de Toto Rina. Lunettes noires, branches dorées, cheveux bouclés plaqués en arrière luisants de gomina. Jeans pattes d’éph’ moule burnes avec le paquet de Winston coincé entre la ceinture et le nombril qui fait mal en tirant sur les poils des « coglioni » à chaque freinage d’urgence. Le peigne dans la poche arrière… Tu penses ! le boss de l’hôtel Hidalgo a craqué, il lui a filé la piaule direct en lieu et place de notre Carmelito « Rey de la Dorna ». Ce dernier marmonne, les dents serrées : « Puta madre, esta chabola es una porqueria de la Ostia ! «
Cojo Nudo ! le temps passe, on va louper le warm-up, chocolate con churros por favor ! et on file sur le circuit.
Attention los Aficionados, maintenant, la Pit lane s’est transformée en CALLEJON…les Toreros de la Racetrack sont prêts c’est l’heure des Cojones Gigantes……. VAMOOOOOOS !
Flashback : L’an dernier, ici même, Quarta en tête, Explication avec MM93, tout droit de Marquez qui repart bon dernier, fait une remontada de malade pour revenir derrière Quarta et …ce terrible highside qui l’envoie 265 jours au bagne…
COURSE MOTOGP : Descente en enfer pour El Diablo , Les Rouges au firmament.
Le regard menaçant de Morbi et Miller sur la grille en disait long sur leurs intentions. Au feu vert allumé, Ils font parler la poudre et mènent la horde au premier freinage. Quarta perd 4 places, Zarco aussi. Rapidement, Fabio va déjouer les plans de Jack et Franky en remontant sur eux, et mener au 4ème tour de la course. Ni la puissance des Ducati, ni l’agilité de Morbi ne peuvent arrêter une irrésistible échappée, il prend quelques mètres à Miller et 2 dixièmes par tour tel un métronome. C’est la course parfaite, personne ne peut rivaliser avec ses chronos. Pour rappel, il sort un 1.36.755 en Q2 s’adjugeant la 4ème pole consécutive de Jerez. El rey de Jerez, c’est lui !
Derrière ça se bouscule, Zarco se bat avec MV12 et fait les affaires de Mir qui caracole devant eux.
Binder chute, c’est ensuite au tour d’A. Marquez et de Rins de goûter la poussière Andalouse.
Quarta creuse l’écart méthodiquement avec 1,6 seconde d’avance, il vient de boucler 14 tours quand il se retourne brutalement au virage 12 et baisse de régime. Son avance fond, Miller arrive comme une balle. La Yam ne ré-accélère plus aussi fort, moteur, pneus ? Il continue de lutter, mais c’est le début d’un long calvaire, il va se faire passer par tout le monde… son avance forgée chez Vulcain s’effondre. Nos espoirs de Marseillaise s’envolent et des gros points pour Fabio d’autant plus que Zarky ferraille dur avec Maverick. Fabio termine 13 ème…
Les derniers tours sont à la fois un supplice et une joie de voir Miller qui était le seul à pouvoir suivre le rythme de Fabio et qui ne démérite pas, loin s’en faut, opéré récemment du syndrome des loges, Jack is Back on Track ! Vous l’avez vu, pleurer devant le museau « hammerhead » de sa Desmosedici dans le parc fermé, il lui murmurait des trucs à l’oreille…
Fabio termine dans son motor-home avec un sac de glace sur le bras droit… syndrome des loges…. Bad news pour le GP de France.
Les 2 Ducati officielles franchissent la ligne d’arrivée devant Morbi inscrivant un doublé historique et la première victoire des rouges à Jerez … Les temps changent…

Top 10 de la course :

1. Jack Miller - (Ducati Lenovo Team)
2. Francesco Bagnaia - (Ducati Lenovo Team) - +1.912
3. Franco Morbidelli - (Petronas Yamaha SRT) - +2.516
4. Takaaki Nakagami - (LCR Honda Idemitsu) - +3.206
5. Joan Mir - (Team Suzuki Ecstar) - +4.256
6. Aleix Espargaró - (Aprilia Racing Team Gresini) - +5.164
7. Maverick Viñales - (Monster Energy Yamaha MotoGP) - +5.651
8. Johann Zarco - (Pramac Racing) - +7.161
9. Marc Márquez - (Repsol Honda Team) - +10.494
10. Pol Espargaró - (Repsol Honda Team) - +11.776

COURSE MOTO 2
Une fois n’est pas coutume, un autre Fabio surnommé « DIGGIA » part devant suivi par Gardner et Fernandez, Lowes est 6ème. Bagarre entre Lowes et Bezecchi, devant Di Giannantonio mène de la tête et des épaules, personne ne va le revoir. Le pilote Federal Oil cavale tel un Lonesome ranger. Arenas chute, Corsi au tapis avec la moto qui part dans les airs comme un hélico…
DIGGIA passe le drapeau à damier, en vainqueur, bel hommage à Fausto Gresini et son team qui n’avait pas gagné depuis le GP d’Aragon en 2016 ! Pour être honnête il était sur un autre niveau, un rythme d’enfer. Bezecchi et Lowes terminent sur le podium.

COURSE MOTO 3
Extinction des feux, les taurillons sont lâchés, après quelques courbes, une escouade de 8 pilotes émerge. Mc Phee chute au deuxième tour. Gabriel Rodrigo mène la troupe et va faire un très gros highside comme on en voyait du temps de Mamola et Spencer. Selon la métaphore de mon frangin qui, depuis l’Ile de la Réunion, ne loupe pas une miette de la saison avec ses potes du Bourbon Moto Club :
« C’est l’envol de l’ange Gabriel »
Une image de circonstance en pleine Pâque orthodoxe avec en filigrane le patriarche Kirill, l’air grave et barbe blanche auréolé d’assiettes en argent au-dessus de la tête !
Tu prends un volume comme ça, tu mets le plan B en route comprenant 3 phases :
✓ Mise en vente Moto sur Le bon coin le lundi matin avec un paquet de 12 rouleaux de PQ offert.
✓ Inscription à l’atelier créatif du cercle des amis du macramé
✓ Abonnement à Télé Loisirs avec le numéro spécial dédicacé par Sophie Davant et les fiches conseils santé de Michel Cymes sur les crises hémorroïdaires.
10 LAPS TO GO : Escadrille de 14 pilotes , tous à l’aspi…. Trio de KTM qui arrivent de front, freinent la moto en travers façon supermot’ mais à 160km/h, plongent à la corde sur les vibreurs … du travail d’artiste ! Leçon d’agilité et de pilotage. Gros cœur les minots. Oncü, Masia, Acosta et Binder se mettent le compte à chaque courbe. Le bouillant Fenati, seul, au milieu de ce maëlstrom orange qui broie tout sur son passage arrive à imposer sa Husqvarna en faisant un Hold-Up après un freinage de bûcheron scandinave qui tronçonne tout le monde à 7 tours de la fin. L’Husky reste sur ses roues, le Maestro c’est lui. Chez KTM, le groupe folklorique Tyrolien, chopes de bières Warsteiner en pogne, en culottes de cuir, chapeaux à plumes qui se tapait sur les cuisses en entonnant « Ich liebe dich Bertha » a laissé place à une stupeur collective. Ils ont bouffé la boîte de calmants et sa notice à grandes gorgées de Red Bull et explosé le coucou en bois suspendu à une cloison du box. Pit Bière, est dépité, pardon ! « Bierer » ( P…n d’écriture semi-automatique, Intelligence artificielle ? stupidité artificielle oui… ! La vraie intelligence c’est celle qui se trompe, qui crée, qui invente, qui a de l’empathie, du charisme).
Acosta ( Teen Macadam Cowboy ) encore lui, fait un Blockpass et enrhume tout le monde. Il est devant ! Oncü, très optimiste en ce début de joli mois de mai se laisse griser, baguenaudant sur les berges riantes du « tout est possible » et les champs fleuris du « Pourquoi pas ? « il chope les freins 5 mètres trop tard et fait un méga-strike sur Binder et Masia.
Acosta, le « cowboy kid » gagne en totalisant 95 points au compteur sur 4 GP ! Il a 2 GP d’avance sur ses potes de promo ! Du jamais vu en moto 3. Carmelo Ezpeleta fait le zouave sur la pitlane, vêtu de l’habit de lumière de Paquirri, il plante des banderilles estampillées Pfizer aux couleurs du drapeau Espagnol dans le cou d’un toro en polypropylène recouvert de feutrine noire offert pour l’achat d’un carton de Manzanilla en promo à la boutique de souvenirs de Béhobie. Il a rechuté, en proie à un nouveau burn-out suite à celui de Miller après son exploit. Les toubibs de la clinique mobile essaient de le ramener à la raison.
Sur le podium Moto 3, on a ACOSTA, qui a sû se contorsionner, en restant sur ses roues, évitant les mines anti-personnel et autres coups fumants, FENATI 2 ème et ALCOBA.
EPILOGUE :
Je ne sais pas ce que vous en pensez mais il manque un truc essentiel à cette saison, LE PUBLIC ! , la clameur qui monte au WARM UP, les aficionados dans les gradins qui supportent nos gladiateurs préférés. Les milliers de motos qui déferlent autour des circuits. On aimerait aussi y être sur ces gradins pour sentir toutes ces bonnes vibrations qui font le sel de l’existence. Ce sont des minutes de bonheur qui, par leur intensité, deviennent éternelles.
J’espère que cette « mierda » de COVID va nous lâcher la grappe, qu’on puisse aller boire un coup chez Don Pacheco pour célébrer nos héros préférés.
Totofsky (CD)